Le bruit de la poulie répétitive et grinçante scandait mes pensées.
Ses mains fines et douces, ses doigts glissaient, effleuraient le membre endolori, lui redonnait sa substance.
La fraicheur de ses mains remplaçaient progressivement la chaleur dûe à l'inflamation de ce genou récalcitrant.
Marie souriait bienveillante et forte à la fois. Son ton se faisait doux pour rassurer lorsqu'elle sentait son patient sombrer dans le découragement, se transformait en autoritarisme presque, en rappel, pour obtenir de lui, la volonté nécessaire pour obtenir le résultat recherché, parfois à la limite du possible lorsque la douleur était intense.
Le cheminement était long, fait de pas en arrière et en avant. L'avant devait gagner, c'est tout.
Cette salle de réeducation voyait des accidentés de moto, amputés, qui voulaient remarcher, grâce à une volonté pugnace, bornée;Le seul but: marcher!
Des miraculés sortis du coma qui avaient atrophiés leurs muscles et qu'ils devaient reconstituer jour après jour pour redevenir ou essayer de redevenir l'être qu'ils avaient été. Le regard étonné comme la découverte d'un monde nouveau.
La poulie grinçait. Marie se retourna vers Monsieur X:
" je vous tourne le dos mais je vois tout, vous vous relachez, amplitude, allez, allez chercher la douleur!"
Monsieur X souriait mais un peu jaune! " c'est pas elle qui a mal, pensait il!"
Quelques silhouettes fantomatiques, constrastaient avec celles des jeunes sportifs qui riaient haut et fort, chahutant, cachant les chaussures de certains kinés, leur jeu favori!
Personnes plus ou moins âgées avec leur appareil à oxygène comme le foetus relié à sa mère par le cordon ombilical. Le souffle de vie, si tenu parfois, que l'on craint qu'il ne s'éteigne à chaque seconde.
Marie était une âme pure, un regard bleu et marron confondu, aucun maquillage, une simplicité, un sourire qui la faisait reine.